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            Au cours de la période statique, plusieurs changements de commandement au sein de la division ont été effectués.

            Le 23 juin, le colonel Ollie W. REED arrivant au 175th prend le commandement de ce régiment, soulageant le colonel PURNELL qui est redevenu Executive Officer.

            Le même jour au 115th, le colonel SHEPPE, qui avait commandé le deuxième bataillon relève le major CUSTER comme commandant du troisième bataillon.

Le Major Maurice G. CLIFT prend le commandement du second bataillon.

            Le 29 juin, le major Thomas D. DALLAS, Executive Officer du 116th, manœuvre ses troupes plus loin vers la gauche pour obtenir une position, de sorte que son attaque puisse être menée le long de la crête parallèle au nord-est / sud-ouest de la route de St Lô --- Bayeux.

LA NUIT DE LA CONTRE-ATTAQUE

            À 01h00, cinq heures avant que l'attaque qui était prévue soit lancée, l'artillerie allemande, qui a pilonné les lignes toute la journée, concentre son feu sur la zone du premier bataillon du 115th, au sud du Bois de Bretel, et le canonne avec le plus intense des tirs de barrage que l'unité ait jamais reçu.

            Lorsque l’artillerie cesse les tirs, des troupes allemandes apparaissent soudain sur la ligne du bataillon. Or, les principales forces prévues pour l'attaque sont concentrées sur la route en contrebas et dans la crique à l'est de Belle Fontaine. Il en résulte un âpre combat au corps-à-corps ; la lutte dure presque jusqu'à l'aube.

            Le commandant du premier bataillon, le major JOHNS, fait le compte-rendu de la bataille de la nuit :

          «  Ils sont arrivés droit sous leur artillerie et leurs mortiers et sont allés sur la route en contrebas, où les compagnies A, B et D avaient leur PC.

Personne ne sait, au juste, comment ils sont arrivés là.

            La plupart des avant-postes avaient la tête baissée lorsque l’artillerie ennemie a frappé, et certains ont été engloutis avant qu’ils aient compris ce qui se passait.

La compagnie A a dit qu’ils sont venus sur eux par le front gauche, à côté de la compagnie C, mais la compagnie C a tenu la position toute la nuit.

            Ils sont allés droit sur les PC des compagnies A et D, tirant à l’intérieur des abris creusés tout le long de la route en contrebas et lançant des grenades dans toutes les directions.

            J’ai entendu dire qu’il y avait des lance-flammes, mais je n’ai jamais parlé à un homme qui en avait réellement vu un…

            Ça a été une mêlée furieuse tout au long de la nuit.

            J’ai été en communication avec les compagnies B et C la plupart du temps, mais je ne savais pas où était la compagnie A.

            Nous avons trouvé leurs pelotons dans la matinée, exactement dans leur position d’origine, avec des Boches morts tout autour d’eux. L’attaque avait été stoppée par les garçons de l’arrière.

           Les mortiers et toutes personnes qui étaient transportables ont été emportés par les hommes, qui ont conservé leur courage et ont continué à se battre.

            Le PC du bataillon n’a eu aucune communication avec quiconque de l’arrière, artillerie ou régiment, pendant une trentaine de minutes, car les Boches avaient envoyé une patrouille pour couper tous les fils que nous avions installés.

            Les radios avaient été simplement vérifiées et éteintes, donc le régiment ne savait pas de quoi il retournait, jusqu’à ce que les radios soient redevenues fonctionnelles, vers 02h00. Ensuite nous avons appelé l’artillerie et pilonné vers le haut et vers le bas de la vallée.

           Juste au début, quelqu’un a attrapé un prisonnier et l’a amené au PC du bataillon. Il a révélé que les Allemands avaient trois compagnies de parachutistes et une compagnie d’ingénieurs de combat servant comme infanterie, et que chaque compagnie avait environ 110 hommes. Ce qui était à peu près la même force que nous avions sur toute la ligne de front.

            Seule une partie des troupes ennemies est revenue vers le PC du bataillon qui était à environ à trois cent ou quatre cent yards derrière la compagnie C, et une chance pour nous, l’attaque est passée à notre droite.

            Tout le monde dans le PC avait un M-1 et un trou dans une haie cette nuit-là. » 

            Le raid a coûté au premier bataillon 184 pertes en soldats tués et blessés, tandis que l’ennemi a laissé 87 corps sur le terrain lorsqu’il s’est retiré juste avant le lever du jour.

            De l’avis du colonel ORDWAY, commandant du régiment, le raid ennemi visait à capturer des prisonniers et obtenir des informations sur le plan d’attaque prévu.

            Selon lui, l’ennemi avait été bien averti qu’il y avait eu d’importants mouvements dans la zone du régiment durant les repos du bataillon.

            Plus tard, la saisie de documents de la troisième division de parachutistes, à BREST, a révélé que l’attaque avait été lancée pour reprendre un petit saillant et éliminer les observateurs de l’artillerie américaine.

            Le Rapport d’action des parachutistes allemands du 11 juillet dit :

            « Le 11 juillet, peu après minuit, les troupes d’assaut du 5ème régiment de parachutistes ont attaqué avec succès en direction de BERIGNY.

            Deux compagnies du régiment on lancé une attaque, avec le soutien d’une compagnie d’ingénieurs, sur un objectif limité.

            Le but était de redresser les lignes, mais ce fut en vain.

            Au cours de la journée, les Américains s’étaient rassemblés pour attaquer St Lô et nos troupes, en rencontrant une forte résistance, ont été contraintes de battre en retraite. »

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REPRISE DE LA CAMPAGNE DE St Lô

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            L’attaque de la nuit a si durement perturbé le premier bataillon du 115th qu’à 05h00, il n’est pas en état pour l’action offensive prévue. Il passe les six heures suivantes à se réorganiser précipitamment.

            Toutefois, dans la zone du 116th, l’attaque est lancée à temps.

            À 06h00, le deuxième bataillon prend la tête d’une colonne de bataillons et dirige l’attaque, poussant vers le sud de Saint André de L’épine.

            Les premier et troisième bataillons associés à l’action rejoignent les troupes à 14h00. Les progrès sont rapides durant la journée et, après avoir atteint l’objectif au sud-ouest de Saint andré de l’épine, le régiment se tourne subitement vers l’ouest et continue son avancée.

            La journée de combat a permis de gagner trois mille yards de terrain et a placé le 116th en position d’attaque vers l’ouest, le long de la ligne de crête menant à St Lô.

       Peu avant midi ce jour-là, le premier bataillon du 115th se remet du raid de la matinée, il quitte sa ligne de départ et se dirige au sud, vers Bellefontaine. Après un après-midi de durs combats, le bataillon est en mesure d’avancer de quatre-cent yards avant de s’arrêter pour la nuit.

            À 17h00, le troisième bataillon s’engage, et à 20h00 le deuxième bataillon s’engage également à l’ouest de la route St Clair --- St Lô, mais dans les deux cas les gains sont insignifiants.

            Pendant la journée, Le 175th, en réserve, bouge ses deuxième et troisième bataillons pour les transférer dans les zones de rassemblement, sur le flanc gauche de la division, bien que son second bataillon ait occupé une position dans le voisinage de le Calvaire pour protéger un écart entre la 29th Division et la 2nd Division, causé par le changement de direction de l’attaque du 116th.

      L’attaque du lendemain, 12 juillet, apporte la capture de Bellefontaine et de la Luzerne par le 115th, tandis que le 116th  poursuit son avance vers l’ouest le long de la crête parallèle à la route de St Lô --- Bayeux.

            Les deuxième et troisième bataillons du 175th passent derrière et sur le flanc du 116th, afin de sécuriser les jump-off positions (positions d’attaque) en vue d’une offensive au sud-ouest.

            Les combats commencent à faire la preuve de la très grande force de l’ennemi ; par exemple, lors de l’assaut de la ville le 13 juillet, le fait que les parachutistes allemands résistent farouchement n’a permis que des gains négligeables. Aussi le lendemain, la division diffère son attaque, se met au repos préférant réorganiser ses régiments pour la reprise d’une attaque plus vigoureuse.

            Deux changements de commandement ont lieu le 13 juillet.

            Le Major ASBURY H. JACKSON est remplacé par le major CLIFT comme commandant du deuxième bataillon du 115th.

            Dans le 116th, le commandement du troisième bataillon passe du colonel MEEKS au Major Thomas D. HOWIE.

            Ce  même jour, le 134th Infantry Regiment de la 35th Division reprend le secteur des premier et deuxième bataillons du 115th à l’ouest de la route d’Isigny --- St Lô, réduisant considérablement la largeur de la ligne de front de la division.

            Le 15 juillet, le colonel Philip R. DWYER prend le commandement du 116th lorsque le colonel CANHAM, qui commandait le régiment depuis sa première formation en Angleterre, est muté de la 29th Division à la 8th Division comme Assistant Division Commander.

            Lors de la reprise de l’attaque au 15 juillet, la division doit porter le gros de ses efforts à soutenir la poussée du 116th, sur la crête de Martinville.

            Le 175th, qui a connu beaucoup de difficultés à avancer le long de la route de St Lô --- Bayeux sous le feu des Allemands positionnés sur la crête sud de cette route, reste en poste sur le flanc gauche de la division.

            Le 115th doit venir en direction du sud-ouest depuis La Luzerne, dans le but d’atteindre les hauteurs à l’ouest de Martinville, détournant ainsi une partie de l’ennemi loin de l’avancée vers l’ouest du 116th, qui reste l’objectif principal.

            Alors que le troisième bataillon du 116th participe de nouveau à l’attaque dans la matinée du 15 juillet, il essuie une solide concentration de tirs au fusil, à la mitrailleuse, au mortier, au canon automoteur et autres pièces d’artillerie.

            Sept chars de soutien du 747th Tank Battalion sont détruits et l’attaque se solde par un statu quo.

            Le premier bataillon, destiné à alléger la pression sur le troisième et à relancer l’avance, ne fait aucun progrès.

            Le deuxième bataillon du 175th, engagé dans un mouvement de diversion, est durement touché alors qu’il se déplace le long de la route de St Lô ; il est aussi contraint de s’arrêter après avoir progressé de quatre cent yards.

            Sur le flanc droit, le 115th qui a attaqué simultanément avec le 116th, n’a eu ce jour-là, tout comme les autres, que des gains limités.

            Son premier bataillon, menant l’attaque à l’est de la route d’Isigny --- St Lô, est ralenti par des tirs venant à travers les haies du sud et de l’ouest, et de la crête de Martinville où l’ennemi avait un poste d’observation sur ces haies.

            Toutefois, le bataillon réussit à gagner quatre cent yards avant d’être stoppé à nouveau.

            À midi, quand le deuxième bataillon est affecté sur la gauche, il ne peut pas passer le feu provenant de la crête de Martinville.

            Malgré le peu de terrain gagné sur l’ennemi, le général GERHARDT juge bon d’envoyer un mémoire écrit ce jour-là aux commandants de ses régiments et bataillons, dans lequel il évoque « de très bons résultats ». Dans le même temps, il les exhorte à se mettre en route.

LA BATAILLE DE LA CRÊTE DE Martinville

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            Les frappes aériennes se concentrent sur les hauteurs près de La Barre de Semilly, au sud de la route de Bayeux et en face du 175th, où des canons de 88mm allemands ont été mis en place.

            Une lourde préparation d’artillerie est également décidée sur les hauteurs près de LA Madeleine, objectif du 116th, et lorsque l’attaque reprend ce soir-là, les premier et deuxième bataillons du 116th traversent avec une rapidité inattendue les positions ennemies.

            L’état-major est réticent à laisser continuer l’attaque dans l’obscurité et, conscient de la force de l’ennemi occupant la crête, il ordonne l’arrêt de l’attaque — là où elle en est — pendant la nuit.

            Cet ordre a été reçu par le premier bataillon, alors qu’il était déjà arrêté par l’ennemi, à quelques cinq cent yards de sa ligne de départ.

Cependant il n’a pas atteint le deuxième bataillon avant que cette unité, progressant d’un demi mile à travers les haies, ait atteint son objectif, près de LA Madeleine, sur la route de St Lô --- Bayeux.

            Dès que l’ordre est reçu, le deuxième bataillon creuse des abris pour la nuit et crée un périmètre de défense autour de sa position avancée.

            Lorsque la nuit vient, les Allemands se déplacent derrière les lignes du bataillon, coupent les fils de communication qui relient le bataillon au régiment, cependant, une communication sporadique est maintenue par le biais de la radio du capitaine Iva L. HARPER, Liaison Officer du 111th Field Artillery.

        Le général GERHARDT est réticent à rappeler le deuxième bataillon qui, du fait de sa position avancée, est menacé : il ne veut pas risquer de devoir rendre ce demi mile de terrain si durement acquis ce soir-là. En outre, la réussite d’un retrait n’est pas garantie.

            Au lieu de cela, le général décide de mobiliser le reste du régiment, pour faire la jonction avec les troupes de La Madeleine le lendemain matin, le 16 juillet.

            Pendant ce temps là, les Allemands reviennent et rétablissent la ligne de Martinville, que le deuxième bataillon avait pénétrée.

            Le 16 juillet, les résultats de l’action offensive de la division ont été décevants. La tentative du 115th, au sud de la crête de Martinville, n’a permis de gagner que trois cent yard de terrain après une longue journée de combats.

           Ailleurs sur le front de la division, les autres unités, au lieu d’attaquer, font leur possible pour défendre leurs lignes contre la pression croissante des contre-attaques ennemies.

            Le premier bataillon du 116th, en position à cinq cents yards à l’est de Martinville, subit le plus gros cette pression, repoussant deux attaques successives des forces allemandes.

            Faisant suite à un barrage d’artillerie de deux heures, la première contre attaque profite d’une brèche de sept cent yards qui existait entre le flanc gauche du premier bataillon et le 175th.

            Cette contre-attaque frappe la crête sud, avec trois chars et une centaine de parachutistes, dont certains sont armés de lance-flammes.

            Le premier bataillon réussit à repousser les assaillants avant qu’ils soient assez proches pour mettre le feu à ces positions : les Allemands se retirent de la crête.

            La deuxième contre-attaque est lancée vers l’est de la crête de Martinville, frappant le bataillon sur son flanc droit. Elle inflige de nombreuses pertes et paralyse la compagnie A.

            Un char allemand faisant sauter des haies avec son canon, tue une équipe de bazooka et repère puis anéantit toute autre tentative visant à faire feu sur lui.

            À la suite du premier impact de la contre attaque, la compagnie A se retire de sa haie, mais elle reforme rapidement une nouvelle ligne, le PVT Harold E. PETERSEN, qui montre d’admirables qualités de meneur d’hommes au cours de cette bataille, chasse le char avec six frappes directes en utilisant son fusil lance-grenade.

            L’infanterie allemande, avec son tank mis hors service, se retire sous le feu nourri de la compagnie reconstituée

            Le deuxième bataillon du major BINGHAM est à LA Madeleine, il passe la nuit du 15 au 16 juillet sans subir de contre-attaque.

            L’ennemi n’attaque pas le bataillon ce qui semble indiquer qu’il n’a pas connaissance de sa présence. Cette ignorance ou ce manque d’agressivité de l’ennemi, est en revanche une chance pour le bataillon isolé, presque à court de munitions.

            Prendre soin de ses trente-cinq hommes blessés du bataillon est la plus grande préoccupation des trois infirmiers, bien que les avions de liaison de l’artillerie les aident en larguant des poches de plasma.

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            Le soir du 16 juillet, le deuxième bataillon est encore isolé à La Madeleine, le reste de la division étant au point mort ou récupérant des différentes contre-attaques ennemies.

            Le plan d’attaque du 17 juillet est de porter le 115th sur les hauteurs nord de LA Madeleine. Le 115th protégerait alors les positions arrière de Martinville.

            Pendant ce temps là, le 116th prend contact avec le deuxième bataillon, tandis que le 175th pousse au sud-ouest le long de la route de St Lô --- Bayeux.

            L’action du 116th apporte un début de secours, bien que limité, au bataillon du major BINGHAM.

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            Le 17 juillet à 04h30, l’attaque du troisième bataillon du major HOWIE, est rapide et silencieuse. Il se déplace sans s’annoncer par des tirs d’artillerie ou d’armes légères, se glissant à travers la principale ligne de défense allemande à Martinville. L’attaque repose uniquement sur l’utilisation de grenades et de baïonnettes sous le couvert du brouillard du matin.

            Cette poussée rapide a positionné le troisième bataillon à proximité de LA Madeleine où le contact a été pris avec le major BINGHAM, à l’est du village vers 06h00.

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            Le plan du régiment appelait le deuxième bataillon, après la relève, à poursuivre jusqu’à Saint–Lô. Il est cependant évident que cette unité n’est pas assez solide pour mener à bien cet objectif et le troisième bataillon reprend la mission.  

            Le major HOWIE rassemble ses commandants de compagnie au PC du bataillon pour leur donner l’ordre d’attaque.

            Presque aussitôt, l’artillerie ennemie fait feu ; le PC du bataillon est touché par des obus de mortiers et le major HOWIE est tué.

            Le capitaine William H. PUNTENNEY, Executive Officer, prend immédiatement en charge le bataillon, mais l’attaque est suspendue.

            L’intensité de l’attaque de l’artillerie ennemie et la possibilité d’une attaque d’infanterie dans la foulée maintient le troisième bataillon en position de défense dans un périmètre proche du deuxième bataillon. Tout au long de la journée, les bombardements sont continus.

            Vers 18h00 une contre-attaque se forme dans le secteur des deuxième et troisième bataillons avec un faible de taux de pénétration dans leurs positions.

            Tous les signes indiquent, toutefois, que les Allemands se préparent à une attaque d’envergure.

            Des tanks ont été entendus se déplaçant au sud de la route de St Lô --- Bayeux et un char a été vu près de LA Madeleine.

            Bien que les concentrations d’artillerie lourde aient été placées dans les zones de ces bataillons, la situation reste suffisamment grave pour justifier une demande de frappe aérienne.

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            Cet exemple d’une manœuvre de soutien aérien ciblé (close air support) devait devenir le standard pour toute action Air/Terre au sein de la division.

            Le 506th Fighter Bomber Squadron, en charge de cette mission, reçoit ses derniers ordres par radio, de la part de l’Air Support Officer de la 29th Division, tandis que ses avions sont en vol.

            Il fait encore clair lorsqu’il est 20h45. Les hommes du 116th disposent des panneaux rouges et des maillots de corps (undershirts) sur le terrain pour marquer leur ligne. Un nombre suffisant de ces marques est visible depuis le ciel, ce qui permet aux avions de connaître la position des bataillons.

            Les avions larguent leurs bombes sur la concentration de chars et reviennent plusieurs fois mitrailler les chars et l’infanterie qui les accompagne.

            Sous ce bombardement lourd, la contre-attaque allemande avorte et les Allemands se retirent avec de lourdes pertes.

            Cette menace éliminée, le troisième bataillon entreprend de renforcer sa position dans la perspective d’une autre attaque ennemie.

            Des Teller Mines provenant d’un proche dépôt de munitions allemand abandonné sont placées sur la route de St Lô --- Bayeux et sur la route nord sud qui passe par LA Madeleine.

            Cependant, le bataillon n’est pas davantage perturbé par l’enthousiasme de l’ennemi cette nuit-là.

            Dans la soirée, le problème du ravitaillement, essentiel aux bataillons isolés, est partiellement résolu.

            La compagnie A a recruté et formé des porteurs volontaires provenant des unités d’artillerie ou d’unités anti-char, chacune de ces compagnies contribuant à hauteur de vingt hommes.

            Cette nuit-là, tous ces hommes, sauf un, parviennent à apporter des fournitures aux bataillons. Le Lieutenant Hallie F. WILLIAMS, de l’Anti-Tank Company de la 116th est tué par les avant-postes du deuxième bataillon qui le prennent pour un ennemi.

            Le 116th Headquarters a tenté de faire passer le mot au deuxième bataillon que les hommes de l’approvisionnement étaient en chemin, mais comme la seule la radio qui fonctionnait dans le secteur du deuxième bataillon était éteinte pour préserver la batterie, le message n’est jamais arrivé.

            Le lendemain, cependant, la compagnie A met en place une ligne d’approvisionnement vital (life line) depuis la crête de Martinville, envoyant deux colonnes à travers les haies, visibles l’une par l’autre, et dispose également des hommes dans chaque champ des deux côtés de la route.

            Quand cette colonne atteint les bataillons isolés, l’approvisionnement et les évacuations commencent.

            Le 17 juillet, sur les autres fronts régimentaires, la division rencontre des succès variables après une longue journée de combat et de manœuvre.

            Le 175th est arrêté dans sa tentative d’atteindre les hauteurs de la route de St Lô --- Bayeux, subissant de lourdes pertes.

            C’est le deuxième bataillon qui souffre du plus grand nombre de victimes.

            Au cours de la journée le lieutenant colonel William T. TERRY, commandant du premier bataillon, est tué.

            Le major Miles C. SHOREY, Executive Officer, prend le commandement du bataillon pour la deuxième fois en un mois.

            Le 115th cependant, connait plus de réussite. Après son attaque vers le sud contre les fortes défenses allemandes situées à La Cauchais, où il n’est que peu touché, le 115th manœuvre dans la zone du 116th avec le deuxième bataillon dans une tentative de flanquement large.

            Le plan prévoit que le bataillon doit tout de suite faire face à l’ouest, une fois la crête atteinte, et ensuite attaquer à l’ouest, à l’arrière des positions allemandes.

            En début de soirée, le deuxième bataillon est sur la crête à l’est de Martinville, et peu après minuit, le bataillon se trouve derrière la forte position allemande du Cauchais, celle qu’il n’avait pu pénétrer.

            Malgré une légère résistance, le bataillon continue jusqu’au village de La Planche, à l’ouest de Martinville, qu’il atteint vers 02h30. Là, il s’enterre pour le reste de la nuit.

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           Dans la matinée du 18 juillet, l’action conduit le 115th à la périphérie de St Lô.

           Le premier bataillon, avec son flanc gauche sur la route d'Isigny --- St Lô, avance rapidement vers le sud pour s’emparer d’une partie du sud de St Georges Montcocq à 12h15, où il établit des barrages routiers aux traversées à l’est de St Lô et envoie des patrouilles de reconnaissance dans la ville.

            L’ensemble de la division se trouve maintenant sur la pente intérieure des hauteurs surplombant St Lô, tandis que la 35th Division, sur le flanc droit de la 29th, avance sur les collines nord du coude de la VIRE, au nord-ouest de la ville.

St Lô semble désormais mûre pour la capture.

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LA TASK FORCE C

            Deux jours avant, le général GERHARDT, anticipe cette situation, il a organisé un groupe de bataille, la Task Force C, C pour COTA, dont la mission est la capture de St Lô.

            Le général COTA doit fondre sur la ville avant que les Allemands aient une chance de lui résister.

            Ce groupe de combat a été officiellement formé le soir du 16 juillet, avec le général COTA à sa tête, se réunissant à Couvains avec les unités suivantes :

- Le 29th Cavalry Reconnaissance Troop

- Un peloton de char moyen, le 747th Tank Battalion

- Un peloton de la compagnie de Canon de la 175th

- Un peloton de l'Antitank Company de la 175th

- Un détachement de la section 29th Military Police

- Une section des affaires civiles

- Un peloton du 121st Engineer Battalion

- Un peloton de reconnaissance du 821st Tank Destroyer Battalion

- La compagnie B du 803rd Tank Destroyer Battalion

- Deux observateurs d'artillerie, un du 227th Field Artillery Battalion, un autre du Division Artillery Headquarters.

            La Task Force C est mise en alerte le 18 juillet à midi, et à 15h10, elle commence à rouler hors de Couvains, sur la route de St Clair --- St Lô.

            Le premier bataillon du 115th qui est engagé dans une lutte au nord de St Lô et à l’ouest de la route doit rompre le face à face avec l’ennemi et se joindre à la colonne, derrière les troupes de reconnaissance, les tanks et les tanks destroyers.

            Le retrait du 115th est rapidement accompli : le bataillon forme deux colonnes et se place derrière la colonne mécanisée.

            Un char fléau mène la marche, équipé à l’avant d’un tambour tournant avec des chaînes tourbillonnantes qui fait exploser les mines se trouvant sur la route.

            Lorsque la colonne déferle sur la route escarpée et sinueuse qui mène à St Lô par le nord, elle est immédiatement harcelée par des tirs d’artillerie.

            Les obus d’artillerie viennent en rafales de dix ou douze, à intervalles de deux ou trois minutes.

            Les premières troupes du bataillon hâtent leur marche afin de sortir de ce feu d’artillerie aussi rapidement que possible. Ce faisant, le bataillon se heurte littéralement à la ville.

            Dès que le bruit des obus se fait entendre, les hommes sautent dans les fossés de chaque côté de la route. Puis ils crient « LET’S GO ». Alors, ils se remettent sur pied, accélèrent et ressautent dans le fossé quand les obus suivants tombent.

            La troupe du 29th Cavalry Reconnaissance, qui est commandée par le lieutenant Edward G. JONES, JR., et des patrouilles du premier bataillon du 115th, conduisent le groupe de combat dans St Lô, avec la mission d’occuper une grand espace près du centre de la ville, cette place ayant été choisie comme base d’opérations.

            Les tanks et les tanks destroyers entrant dans la ville, sont déplacés aux carrefours stratégiques et sont rejoints par de petits groupes de cinq hommes du premier bataillon, compagnie C.

            La compagnie A est commandée par le lieutenant GRIMSEHL, elle doit nettoyer la partie sud-ouest de St Lô, tandis que la compagnie B du capitaine WEDDLE se déplace dans la zone sud-est, escaladant de grands tas de pierres et de gravats. Restant vigilants et en alerte, les hommes fouillent les bâtiments vidés et qui n’ont plus de toit.

            St Lô n’est pas fortement défendu par les Allemands, mais de nombreux combats de maison à maison se produisent pendant les opérations de nettoyage.

            Le général COTA établit son PC dans une distillerie et un moulin surplombant St Lô au nord de la ville, puis il entre dans la ville.

            Pendant qu’il prend la mesure de la ville, observant et dirigeant les actions, le général COTA est touché au bras par un éclat d’obus.

            Il refuse d’être évacué, et après que le personnel médical a bandé sa blessure, il met simplement sa canne sur son autre bras et s’éloigne.

            Plus tard, il sera évacué.

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           Le colonel Alfred V. EDNIE qui a remplacé le colonel ORDWAY comme commandant du 115th tient ce jour-là un rôle important, en dirigeant et répartissant les troupes et véhicules dans St Lô, mais aussi en organisant la défense de la ville.

            Pour déclarer la capture de la ville, la 29th Division place ses couleurs divisionnaires sur des ruines de St Lô, tandis que la bataille se poursuit encore, conformément à l’ordre du général GERHARDT.

            La place principale est lourdement bombardée, elle est surnommée « le coin aux mortiers » par les soldats de la TASK FORCE.

            Le colonel Edwaard H. MCDANIEL, Division Chief, donne un drapeau Blue and Gray au Staff Sergeant Gerald DAVIS, affecté au premier bataillon du Headquarters du 115th. Celui-ci monte au deuxième étage du café MALHERBE et accroche le drapeau à une fenêtre.

            Un obus antichar allemand s’écrase à proximité et le souffle de l’explosion déchire le drapeau.

            Il est pourtant accroché à nouveau, et cette fois il reste intact.

            Les actions du groupe de combat se limitent la plupart du temps à du nettoyage.

            Il y a peu de résistance organisée à St Lô, malgré un lourd feu de l'artillerie ennemie ; partout dans la ville, de petits groupes désorganisés renoncent au combat.

            À 17h30, toutes les troupes et les chars sont en position, et toute résistance un tant soit peu organisée est maîtrisée.

            La chute de St Lô, dont l’importance stratégique est équivalente à celle de CHERBOURG, a été rapportée par le général GERHARDT au major général Charles H. CORLETT, XIX Corps Commander, dans une annonce officielle teintée de fierté :

            « J'ai l'honneur d'annoncer au commandant du corps que la Task Force C de la 29th Division a pris le contrôle de la ville de St Lô, après quarante-trois jours de combat continuel, depuis les plages jusqu’à St Lô... 29 let's go ! »

            L’action offensive à l’est de St Lô le 18 juillet se limite aux deux autres bataillons du 115th, puisque le 116th et le 175th demeurent sur des positions défensives.

            Le deuxième bataillon, reprenant son attaque après sa progression soudaine de la veille au soir, est dirigé vers le sud-ouest de La Planche vers le Haras /  banlieue de St Lô /

            Il est arrêté après environ sept cents yards par un tir de mortier et de mitrailleuse lourde. Peu de temps après, il reçoit l’ordre de changer de direction et d’avancer au sud de l’église Sainte-Croix DE St Lô.

            Le bataillon prend le contrôle de cet objectif à 19h00, coupant la sortie de la route à l’est de la ville.

            Le troisième bataillon s’installe au sud-ouest de la crête de Martinville en direction de la route, et à 16h00, la compagnie I atteint la piste de course sur le bord oriental de St Lô.

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           Pendant que les hommes des compagnies K et L du 115th, déployés le long des haies sur la route de St Lô --- Bayeux, mangent leurs rations C, un groupe d’environ trente parachutistes est observé, descendant la route vers St Lô, apparemment pas informés de la présence des troupes américaines.

            Dans les haies, une mitrailleuse de calibre 30 avait été mise en position pour couvrir la route.

            Le Technical Sergeant Amber GLIDEWELL, chef de section de la compagnie M, et un membre de la compagnie K qui parlait allemand, se précipitent en haut des haies et appelent les parachutistes à se rendre sans combattre.

            Un parachutiste allemand qui semble être le leader du groupe crie :

« — Abandonner ? Non !!! Vous, abandonnez !!! Nous vous avons encerclés ! »

            Après avoir dit cela, il envoie une rafale de son pistolet mitrailleur en direction du Technical Sergeant GLIDEWELL sans l’atteindre.

            Immédiatement la mitrailleuse lourde ouvre le feu avec de longues rafales qui font un tiers de victimes dans le groupe, les autres se précipitent hors de la route et disparaissent dans les haies.

            Au cours de la nuit du 18 juillet et le lendemain l’ennemi tente de nouvelles et vaines contre-attaques en direction de St Lô et son artillerie continue à harceler la ville.

            Les bombardements intensifs perturbent toutes les communications filaires, les radios ne fonctionnent pas non plus, le seul moyen de contacter le PC de la division est le courrier.

            Le Technical Five Class Ernest L. MARTIN, est affecté comme messager du PC, il maintient la communication entre la route d’Isigny et le PC de la division qui se trouve dans Le Bois De Bretel.

            Dans la matinée du 19 juillet, le premier bataillon est absolument sans communication radio ou filaire avec l’arrière. Une grande concentration d’infanterie allemande est signalée au sud-ouest de la ville.

            À cause de ce problème de communication, il est impossible d’obtenir un appui d’artillerie.

Presque au même moment, selon un rapport, le PFC John C. HENDERSON, standardiste du PC du bataillon appelle le major JOHNS :

            « — Major, les téléphonistes ont trouvé un fil téléphonique coupé et ils vont le réparer mais ils ne savent pas où il va. Est-ce ok ? »

            « Bon sang, oui !!! », dit le major.

            HENDERSON appelle l’unité inconnue qui est à l’autre bout du fil :

            « — Bonjour c’est Lagoon Red. Qui êtes-vous ??…. Angel ?? Qui est Angel… ?? Vous dites que vous êtes l’artillerie ? Les 155mm ?  Major, ce sont les 155mm !!! »

            Par le plus grand des hasards, la découverte fortuite de ce fil coupé, a permis d’obtenir l’artillerie nécessaire pour repousser ce qui aurait pu être une contre-attaque grave contre St Lô.

            Angel était le nom de code du 967th Field Artillery Battalion.

            Angel n’avait jamais eu de contact direct avec Lagoon Red avant ce jour… ni après. Il est reconnu que ce contact avec Angel fut comme providentiel, à un moment de grande incertitude.

LE MAJOR DE St Lô

            Vers 07h30, le 19 juillet, sur la place principale de l’église Sainte-Croix, un cercueil drapé d’un drapeau américain est transporté sur le haut d’un tas de pierres. Ce cercueil est placé avec révérence sur les gravats du mur d’enceinte de l’église.

            Dans le cercueil repose le corps du Major HOWIE, qui vient de mourir à l’arrière sur la crête de Martinville, juste le jour qui a précédé la prise de la ville.

            Le matin de sa mort, avant que le bataillon, dans l’aube silencieuse, ne mette en route l’attaque qui l’amènerait à établir le contact avec le second bataillon isolé à LA Madeleine, le major HOWIE prend congé de certains de ses officiers avec les paroles suivantes :

« On se revoit à St Lô ! »

            Cette phrase, bien qu’elle semble ordinaire, a jailli du cœur d’un soldat qui a longtemps attendu la perspective du grand jour, où la ville tomberait, où la campagne serait terminée, où la division quitterait le front.

            Le désir de chaque soldat tapi dans les haies de St Lô, transparaît dans cette salutation, car chaque soldat savait que St Lô était l’objectif.

« See you in SAINT LO » était une manière combattive de dire « Au revoir ».

            Quand le major HOWIE est mort, le général GERHARDT a décidé que la promesse qu’impliquaient les mots du major devait se réaliser.

            Lorsque la colonne blindée de la Task Force C a balayé St Lô, la dépouille du major HOWIE est montée avec elle.

            Une ambulance a transporté son corps dans la ville.

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            Cette histoire était amenée à devenir l’un des plus connus des épisodes dramatiques qui eurent lieu en marge de la guerre.

            Les correspondants de guerre se sont emparés de cette histoire et l’ont rapportée dans toute la presse américaine. Le nom du major HOWIE n’a cependant pas été divulgué, en raison des restrictions liées à la censure de l’époque : pour la presse, il est simplement devenu « le major de St Lô ».

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            La division est restée en position le 19 juillet, le 116th est retiré de la ligne dans la matinée, son secteur étant repris par le deuxième bataillon du 115th.

            Des patrouilles du 113th Cavalry Squadron sondent les routes à la sortie sud de St Lô pendant la journée. Elles découvrent que l’ennemi s’est retiré de façon limitée.

            Sur les hauteurs à mille yards au sud de la ville, les Allemands restent fermement en place, prêts à défendre le point d’observation qu’ils détiennent au-dessus de la ville.

            L’ennemi continue à diriger des tirs d’artillerie lourde sur St Lô tout au long de la journée, avec une concentration de tirs intense le matin entre 09h30 et 10h00.

            Le PC du premier bataillon, qui a pris position à l’étage d’un magasin près du carrefour principal, est obligé de se déplacer du fait de l’intensité du bombardement.

            Le nouvel emplacement du PC est un grand mausolée de pierre dans un cimetière du secteur nord est de la ville, dont la pierre tombale est utilisée comme table des cartes.

            Dans la nuit du 19 juillet, une attaque se produit au sud de St Lô, mais elle est repoussée avec les armes et l’artillerie bien dirigée du 110th Field Artillery Battalion.

            Un peloton de la compagnie K du 115th qui a reçu l’ordre de se mettre en réserve dans la ville, se déplace dans une rue au moment de la contre-attaque allemande du 19 juillet, lorsque des avions allemands survolent la ville vers 23h00.

            Un chapelet de bombes tombe sur la colonne, ce qui entraine de lourdes pertes au sein du peloton, en morts et en blessés.

            Quoiqu’il en soit, le projet de la mise au repos de la division est maintenu.

            La 35th Division, qui avait combattu pendant la campagne de St Lô sur le flanc droit de la 29th Division, commence à se déplacer vers la Vire reprenant tous les postes de la Blue and Gray.

            À 09h15 le 20 juillet, la relève du 115th est achevée et à 17h20 le deuxième bataillon quitte lui aussi la ligne de front. Tous les bataillons sont ramenés vers l’arrière, soit à pied soit en véhicule, dans une zone de rassemblement, au sud de St Clair sur L’elle, où le 116th se trouve déjà.

            Cependant, les quatre bataillons d’artillerie affectés à la 29th Division restent en place et sont rattachés à la 35th Division. Ils ne seront relevés que dans la soirée du 27 juillet et rejoindront la 29th Division lorsque celle-ci sera de retour au front.

            Cette relève était la première des quarante-cinq jours durant lesquels la 29th Division est restée au contact de l’ennemi.

            En effet, depuis le débarquement à Omaha Beach, la Blue and Gray avait été en face de l’ennemi tous les jours de la campagne, soit six longues semaines.

            Son bilan est de sept mille tués et blessés qui témoignent de l’âpreté des combats.

            Il a été établi que la Bataille de St Lô constitue l’engagement le plus coûteux de la division au cours de son histoire.

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